Charles
Tu te souviens de ton premier show ? Parce que toi, tu vas être présenté juste après, mais tu es comédien, tu me disais ?
Olivier
Tout à fait, oui.
Charles
Premier show à quel âge ?
Olivier
Premier show à 31 ans. C'était le 10 mai 2009. Là, j'ai fêté les 16 ans et quelques jours. J'ai créé un One-man-Show en anglais qui s'appelle « How to become a parisian in One Hour ». Je forme les spectateurs à devenir de vrais Parisiens, donc des personnes très désagréables.
Charles
Intéressant. Tu vas pouvoir nous former. Peut-être pas maintenant. On va garder ça pour la fin, parce que sinon, les gens, ils vont prendre la formation et ils vont arrêter d'écouter alors que tu as plein de choses intéressantes à nous raconter. Donc, le One Hour avec le super accent parisien, c'est fait exprès ou c'est ton vrai accent ?
Olivier
J'ai un accent vraiment prononcé lorsque je parle en anglais. Donc, non, c'est mon accent. On me pose souvent la question: Est-ce que tu forces ton accent ? Non, non, c'est mon accent. L'accent français, il faut le garder.
Charles
Et tu as appris l'anglais où ?
Olivier
J'ai appris aux États-Unis. J'ai fait l'École de cuisine française, c'est l'École Ferrandi, dans le 6ème arrondissement. Et la suite de mon diplôme, j'ai intégré une université américaine à Providence, Rhode Island, près de Boston. Et Je suis passé après quatre ans en Floride, où j'étais manager de restaurant. Donc, j'ai appris l'anglais là-bas.
Charles
Donc ça, c'est dans ta vingtaine, j'imagine ? T'es parti aux États-Unis à 21 ans ?
Olivier
Tout à fait.
Charles
Ok. Et donc, t'es revenu en France pour nous faire profiter de ton humour et de ton expérience, j'imagine ?
Olivier
Ouais, j'ai tout plaqué aux États-Unis. J'avais dit à ma mère lorsque j'avais huit ans, je lui avais dit: Un jour , je serai commedien et je ferais l'Olympia. Elle avait beaucoup rigolé. Elle me dit: Oui, oui, il ne faut pas rêver. Donc, essayer de trouver un vrai travail. C'est ce que j'ai fait. Et donc, à l'âge de 29 ans, j'ai tout plaqué et je suis rentré chez en France pour essayer. Ça n'a pas été facile. J'ai contacté la plupart des producteurs français et personne ne croyait au projet. On me dit: Voilà, tu es français, en anglais, ça n'intéressera personne. Donc, j'ai monté ma boîte de production que j'ai appelée The French Arrogance Production. Je l'ai montée et puis j'ai fait ma première. Il y avait pas mal de monde. Je contactais tout le monde sur Facebook, sur les groupes American in Paris, English in Paris. Donc j'ai réussi à avoir 200 personnes lors de la première. Et au bout d'une semaine, j'ai eu The New York Times qui est venu me voir. J'ai eu beaucoup de chance. Et puis non, il y a eu beaucoup de monde assez rapidement. Logiquement, dans le théâtre, on a quelques années de galère et moi, ça a été très, très rapide. Donc, j'ai eu beaucoup de chance.
Charles
Là, ton spectacle, ça fait combien de temps que tu l'as ?
Olivier
Là, ça va faire 17 ans que je joue. Sans interruption, c'est le plus vieux spectacle de Paris, avec le même casting, vu que c'est moi, seul sur scène. Et puis, j'ai des gens du monde entier qui viennent me voir, beaucoup de Français aussi, on va dire 50% de Français. Et le reste, c'est des expatriés et touristes qui viennent à Paris, qui viennent voir le spectacle.
Charles
Et tu changes un peu tes blagues tous les combien ?
Olivier
Ça évolue. Ça dépend. C'est par période. C'est comme là, par rapport à Trump, je fais quelques blagues. Je parle très peu de politique et de religion. J'essaie d'éviter. Mais tous les quatre, six mois et depuis un an, à la fin du spectacle, les spectateurs me posent des questions sur Paris, sur nos comportements. Et ça dure un petit quart d'heure. Donc c'est un échange libre avec les spectateurs. Ils me posent n'importe quelles questions sur notre vie, sur nos habitudes, sur la nourriture parisienne, sur les restaurants, sur la sexualité, sur plein de choses. Donc c'est ouvert.
Charles
Et tu trouves qu'ils ont beaucoup de clichés sur les Parisiens ?
Olivier
Oui, sur la manière de s'habiller. J'ai beaucoup de spectateurs qui viennent avec le béret, le béret rouge. Je leur dis: Non, c'est juste pour Emily in Paris. Mais ce n'est pas... Aucun Parisien ou aucune Parisienne ne porte le béret.
Charles
Ils savent ou Ils sont sérieux, ils portent vraiment le béret ?
Olivier
ils sont surpris, vraiment. Ils sont très surpris. Pour eux, ils achètent le béret à quatre euros à Saint-Michel et ils sont Parisiens.
Charles
Sans la baguette ?
Olivier
Si, mais ils la mangent. Ils aiment beaucoup. Ils sont fans de croissant, tu sais. Croissant, pain au chocolat.
Charles
Donc toi, ton spectacle, tu l'as pas changé plus que ça depuis tant d'années ?
Olivier
C'est la même structure J'apprends les spectateurs à devenir des Parisiens dans le métro, les taxi, le restaurant, la communication, comment bien communiquer avec les Parisiens. Il y a une partie Night Club aussi où j'apprends les spectatrices à danser comme de vraies Parisiennes, comment attirer un jeune homme français. C'est une petite formation qui dure une heure, une heure et quart. Les gens ressortent du théâtre en étant complètement Parisiens.
Charles
C'est vraiment une vraie formation ? Tu as un vrai but pédagogique derrière ça ?
Olivier
Les gens en apprennent beaucoup. Les gens en aprennent pas mal. Alors il y a beaucoup d'humour et il y a aussi des informations sur le nombre d'arrondissements, pourquoi on appelle la rive gauche, la rive de gauche et la rive droite. C'est quand même aussi informatif. Et même par rapport... Je forme les spectateurs à comprendre nos expressions facielles et ça les aide vraiment. Je reçois souvent des messages sur Facebook, Instagram, TikTok: Merci, grâce à vous, j'ai compris comment il fallait interagir avec du serveur. Non, ça les aide. Mais après, le but, c'est de rire. De rire tous ensemble des Parisiens. Voilà, c'est ça.
Charles
Et tu laisses place un peu à l'improvisation ou c'est 90% scripté ?
Olivier
Il y a deux personnes qui montent sur scène. Donc, il y a des situations des fois très drôles qui se passent et c'est de l'impro. Et s'il y avait toujours le même texte depuis 17 ans, je pense que j'en aurais vraiment marre et c'est tous les soirs différents.
Charles
Là, tu Tu aimes bien ce que tu fais ?
Olivier
J'adore.
Charles
C'est quoi que tu aimes bien ? C'est rencontrer du monde ?
Olivier
Le spectacle me permet de rencontrer des étrangers, donc des touristes ou des expatriés, et d'avoir une relation avec eux que je n'aurais jamais en tant que simple Parisien. Tu vas dans la rue, tu vois un Américain, tu vas lui parler, tout de suite, il a peur. Parce que je peux le comprendre, il a peur qu'on le vole, il a peur... Le fait de jouer le spectacle, à la fin, je les rencontre et on discute ouvertement et c'est super.
Charles
Tu as vraiment cette sensation de proximité avec 200 personnes ? J'imagine maintenant beaucoup plus. C'est quoi la moyenne ?
Olivier
C'est un théâtre de 600 places. Après, le week-end, il y a beaucoup de monde, un petit peu moins de monde en semaine, ce qui est toujours normal. Oui, j'ai une super proximité avec les gens.
Charles
Genre, pendant le show ?
Olivier
Pendant le spectacle, on me pose des questions et puis je parle beaucoup avec les spectateurs.
Charles
Ok.
Olivier
Je désigne des personnes. S'ils refusent, ils ont le droit de refuser. Je leur dis: On est là pour s'amuser, mais si tu es timide, ne viens pas. Mais logiquement viennent.
Charles
Et les gens reviennent ? Ou généralement, c'est une seule fois ?
Olivier
Il y a beaucoup de spectateurs qui reviennent avec des amis étrangers. Il n'y a pas beaucoup d'options à Paris, à part le Moulin Rouge et les bateaux parisiens, tout ça. Mais pour les spectacles, c'est vraiment un moyen aux Français de faire découvrir un spectacle en anglais et et la culture parisienne et française à leurs invités étrangers.
Charles
Et tu disais que tu avais 50% de Français. Oui. Eux, ils viennent pourquoi ? Pour le côté humoristique ?
Olivier
Pour rigoler d'eux-mêmes, parce que c'est vraiment leur vie qui pendant une heure et quart, je parle de leur vie et puis ça les fait rire. Et c'est vrai que pendant une heure et quart, je dépeins le Parisien d'une manière assez négative et les gens me disent: On est vraiment comme ça. Et ce qui est fou, c'est qu'au bout de 17 ans, ça ne m'est jamais arrivé une seule fois qu'un Parisien me dise: Merci beaucoup, grâce à vous, je vais changer. J'ai pris conscience. En fait, les gens sont fiers d'être désagréables, d'être pressés, d'être arrogant. Les gens sont fiers d'être Parisien Il y a l'arrogance parisienne qui est là depuis toujours et les gens sont fiers de ça. C'est fou.
Charles
C'est marrant parce que tu décris les Parisiens comme principalement désagréables, arrogant. Tu le penses vraiment ?
Olivier
Je pense que quand tu es touriste et que tu arrives à Paris, tu peux être choqué par plein de gens. Ça peut être les vendeurs, ça peut être les serveurs. Bien sûr qu'à Paris, il y a des restaurants où tu as des bons serveurs, des gens sympa. C'est souvent des provinciaux qui viennent d'arriver. Après, ils changent. Mais oui, on n'est pas un pays de services.
Charles
Tu en penses quoi de ces serveurs qui vont bien faire leur travail pour potentiellement avoir un pourboire ? Tu trouves que c'est faux ? C'est quelque chose très parisien ?
Olivier
Je pense que c'est un cercle vicieux. Moi, j'ai été serveur très longtemps aussi à Paris. Donc, le client parisien pressé, l'homme d'affaires, je le connais parfaitement et j'avais quand même beaucoup de mal avec eux. Tu ne te sens pas du tout considéré. Tu es vraiment très souvent le chien. On t'appelle, on claque des des doigts et c'est super désagréable. Et je voyais la différence avec mes collègues, les femmes, c'était complètement différent. C'était extrêmement sympa, même au niveau des pourboires.
Charles
Tu as fait ça où ?
Olivier
J'étais au restaurant de Marquette. C'était avenue Matignon, dans le 8ème. J'ai aussi travaillé au restaurant L'Art Bussy, qui est fermé depuis, mais c'était rue de Bussy, dans le 6ème. J'étais manager au restaurant La Suite de David Guetta et Cathy Guetta. C'était le pompon.
Charles
Et ça, c'était pendant tes années à Ferrandi ?
Olivier
C'était un petit peu avant les États-Unis et à mon retour. Juste avant d'écrire le spectacle et de le jouer, il y a peut-être eu trois, quatre ans. Là, j'étais manager ou serveur. J'ai même travaillé en boîte de nuit au Showcase. Tu es jeune, toi. Je ne sais pas si tu connais
Charles
Je ne suis pas trop fait fêtard. C'est quoi ? C'est hyper connu ? C'est genre l'institution ?
Olivier
C'était sous le pont Alexandre III, dans le huitième. Il y avait beaucoup de concerts, des gros DJ où j'ai servi les Beyoncé. Là, c'était vraiment à la mode à l'époque.
Charles
J'ai l'impression que tu veux nous partager des anecdotes sur Beyoncé en boîte.
Olivier
Beyoncé avait bu une bouteille de vin rouge. Ça ne m'était jamais arrivé de servir du vin rouge dans une boîte de nuit. Elle était restée très peu de temps. On avait aussi Prince qui était venu. Mais lui, il faisait la tournée de toutes les boîtes de nuit avec sa compagne qui devait faire 1,98 mètre. Il prenait un taxi, il faisait de boîte en boîte. Il faisait un petit défilé. Les gens passaient sa chanson dans la boîte de nuit et après, il partait dans la prochaine boîte de nuit. C'était assez étrange. Non, c'est sympa, mais même de voir au niveau des physionomistes. Donc à la entrée des boîtes de nuit. Moi, je passais beaucoup de temps à voir les clients se faire refouler, les gens essayer d'entrer, les gens insister. J'ai vu tous ces phénomènes de boîte de nuit et de se faire recaler en boîte de nuit. Ça, je l'ai vécu. Moi, je l'ai vécu en tant que client et je l'ai vécu en tant qu'employé d'une boîte de nuit. Je trouve ça horrible.
Charles
C'est quoi du coup les bonnes choses à faire et ce qu'il ne faut absolument pas à faire ? T'as des retours d'expérience comme ça ?
Olivier
C'est assez compliqué. Pour rentrer en boîte de nuit, déjà, si tu viens avec des filles, c'est gagné. Si elles sont jolies, c'est bon, tu rentres. Mais si tu connais personne tu viens habillé normalement, tu rentres pas. C'est très compliqué. Alors qu'en province ou si tu vas à l'étranger, tu vas en Espagne, tu vas au Portugal, tu rentres partout.
Charles
Il y a une différence ?
Olivier
Il y a une grosse différence. Oui, Complètement.
Charles
Et ça, il n'y a pas une question d'argent ? Une personne qui est très riche, mais mal habillée, elle se fait recale ?
Olivier
Si la physionomiste ne sait pas que tu as de l'argent, tu ne rentres pas. Mais logiquement, quand tu as de l'argent, tu connais du monde et tu rentres.
Charles
À Paris, il y a des bonnes boîtes ? Je ne connais pas du tout le milieu de la nuit.
Olivier
Je ne suis plus sorti, moi, depuis très longtemps. J'ai pratiquement 48 ans. J'ai une fille de 10 ans, donc 48 ans quand tu vas en boîte de nuit, je pense que tu n'es pas très à l'aise. Même si j'adore danser. Les boîtes de nuit, tu y vas 20, 25, 30 ans, ou 35, mais 48 ans...
Charles
Tu dois avoir des boîtes de nuit pour personnes...
Olivier
Âgées ?
Charles
J'allais pas dire âgées, mais... Tu dois avoir des boîtes de nuit qui sont plus pour des jeunes, plus pour des personnes de 40, 50 ans. C'est quoi, toi, tes activités ? Tu aimes bien faire quoi ?
Olivier
Mes activités, je travaille beaucoup. Parce que les gens ont cette image de spectacle où je travaille que de 8h00 à 9h00, de 19h00 à 20h00. Mais avec ma femme, on produit le spectacle, donc c'est un travail énorme. Il faut gérer toutes les réservations, tous les appels, la gestion de tous les sites Internet. C'est vraiment beaucoup de travail. Et depuis un an, je fais des vidéos aussi sur les réseaux, sur Instagram, TikTok, Facebook, et ça prend énormément de temps de tourner, de réfléchir, de répondre aux commentaires. Et ça me prend beaucoup de temps Je ne sais pas, quatre, cinq heures par jour sur les réseaux à répondre aux gens, répondre aux messages privés et créer de nouvelles vidéos, les tourner, les sous-titrer. Non, c'est beaucoup de travail. Je ne pensais pas du tout que c'était autant de
Charles
Je pense que tu aimes déjà faire ça.
Olivier
J'aime beaucoup.
Charles
Répondre aux gens, typiquement.
Olivier
Oui, j'aime bien. Et j'aime bien répondre aux gens qui sont désagréables.
Charles
Ok. Pourquoi ?
Charles
Parce qu'en fait, il y a deux options.
Charles
Je suis sado.
Olivier
Je n'ai pas beaucoup de messages désagréables, mais ça m'arrive. Mais en fait, je me suis rendu compte que si jamais tu lui réponds en étant agressif, ça ne s'arrêtera jamais. Si tu es gentil et que tu mets des petits cœurs, il n'y a plus aucun message derrière.
Charles
Toi, le but, quand tu réponds, c'est quoi ? C'est de lui montrer qu'il a un comportement un peu déplacé ? Oui. Pourquoi tu réponds à des personnes qui sont désagréables ?
Olivier
Pourquoi ? Je le réponds toujours gentiment. Je ne suis pas plus agressif que eux, parce que ce n'est pas le but. Mon but, ce n'est pas que mon Instagram ou TikTok soit une guerre civile. Je trouve ça stupide. Déjà, je trouve ça C'est stupide que les gens prennent le temps de marquer un mauvais commentaire. Mais bon, après, il y a des gens qui ont que ça à faire et ça leur fait peut-être du bien d'être méchants. Je leur dis: Non, je la réponds en étant un petit peu sarcastique. Je ne comprends pas trop pourquoi tu es aussi méchant, mais tu devrais venir voir mon spectacle. Tu rigolerais, ça te ferait du bien à ton moral. Allez, viens, tu vas passer du bon temps. On pourra discuter après avec trois petits cœurs et je n'ai plus de nouvelles. Et c'est très bien.
Charles
Parce qu'il t'envoie quoi comme message ? Genre Pourquoi tu parles comme ça des Parisiens ? Déjà, c'est des étrangers ou des Français ?
Olivier
Non, c'est souvent des gens de province, par exemple, parce que les Parisiens rigolent. Vraiment, personne n'est choqué. Les gens trouvent ça vrai. Des fois, exagéré, bien sûr. Tout le monde n'est pas comme je le fais dans les vidéos, heureusement. Mais non, les provinciaux, je fais beaucoup de vidéos aussi sur Bordeaux, Toulouse et les gens prennent ça au premier degré. Les Parisiens restaient chez vous à cause de vous. L'immobilier a augmenté. Les gens sont super énervés contre les Parisiens, donc c'est moi qui reçois ces messages-là.